« Désormais, la lettre et ses mots affreux se trouvaient cachés dans le grenier de la sacristie, écrasés sous de vieux textes liturgiques. Jean recelait son mal en haut d’une église qu’il avait toujours considérée comme son refuge. Il priait pour que l’écrin de pierre et leur charge sacrée étouffent le papier, qu’ils soient une barrière aux ondes néfastes qui malmenaient son cerveau. En entassant les livres anciens sur le courrier, il avait été frappé par le silence régnant alentours, s’était interrogé sur le mécanisme des cloches. Mais une voix avait alors surgit d’en bas, lui nouant l’estomac. Alice ! Il l’avait entendue gravir l’escalier ainsi qu’un prédateur. Quand elle avait tenté en vain de pénétrer dans le grenier fermé à clef, qu’il avait distingué son ombre sous la rainure de la porte, attendant un bruit trahissant sa présence, elle ne lui était plus apparue comme une amie, ni même comme celle qu’il avait connu. Ce n’était plus une jeune femme comme les autres, mais un corps avide de réponses. Un organisme malade et résolu. Sa présence derrière la porte, à l’instant où il dissimulait l’enveloppe, n’avait rien eu d’un hasard. Quelque chose, omniscient et nuisible, était entré en Alice. Une entité maléfique usait de son corps ainsi que d’un pantin, une chose morte la manipulait dans le but d’accomplir une œuvre non exécutée de son vivant. Un mal inassouvi, vengeance obsessionnelle. Jean croyait aux esprits. Derrière la porte du grenier, dans cette ombre à l’affut, il avait vu l’un d’eux, une âme torturée revenir vers lui, celle d’un être qui avait autrefois écrit, hurlé, et qu’on avait ignoré. Qu’il avait ignoré.
Désormais, Elle frappait à sa porte, l’appelait. Depuis un autre corps, Elle agissait. »
L’église et son secret, extrait d’Arlena ©, roman de Sebastian Regert.